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la Chambre avait décidé qu’on donnerait un témoignage de respect au colonel. Aussi, dès qu’il se fut assis à son banc, le président, M. Robinson, prit la parole, et avec l’éloquente facilité d’un avocat et la chaleur d’un ami, il remercia le jeune colonel pour les services distingués qu’il avait rendus à son pays.

Washington se leva pour répondre ; il rougit, il bégaya, il trembla, et ne put trouver un mot. Le bon Robinson vint à son aide.

— Asseyez-vous, monsieur Washington, dit-il en souriant : votre modestie égale votre valeur, elle en dit plus que toutes mes paroles.

Telle fut l’entrée de Washington dans la vie politique ; tel fut son premier discours, et, à vrai dire, s’il parla mieux, il ne parla jamais beaucoup plus. « Jamais, dit Jefferson, je n’ai entendu le général Washington ou le docteur Franklin parler plus de dix minutes à la fois, ni toucher autre chose que le point principal, bien sûrs que toutes les petites raisons suivraient d’elles-mêmes. Je crois, ajoute Jefferson, que, si les membres des assemblées observaient cette règle, ils feraient plus de besogne en un jour qu’ils n’en font en toute une semaine[1]. »

Plus d’un général a été aussi peu éloquent que Washington ; mais la différence entre Washington et la plupart des généraux, c’est que Washington a toujours été un personnage civil, un citoyen, dans le plus beau sens du mot. Il n’a jamais mis l’épée au-dessus de la toge.

  1. Mémoirs, I, 50 (éd. 1829).