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rard (de Rayneval), premier commis des affaires étrangères, ainsi qu’un mémoire présenté au roi par M. de Vergennes[1], avait examiné la question et réglé la conduite de la France.

Il y avait trois partis à prendre : 1° la guerre ; 2° une paix franche avec l’Angleterre ; 3° une neutralité qui secourrait les Américains, en les reconnaissant comme belligérants.

La paix franche avec l’Angleterre, M. de Yergennes n’en voulait pas.

« Les Anglais, disait-il, habitués à se conduire par l’impulsion de leurs intérêts, et à juger des autres par eux-mêmes, croiront toujours que nous ne laisserons pas échapper une si belle occasion de leur nuire…

« Une apathie trop marquée… sera interprétée comme l’effet de la crainte, et de cet amour immodéré de la paix qui, depuis peu d’années, a produit tant de maux et d’injustices… Il est à craindre, en ce cas, que l’Angleterre ne devienne plus exigeante encore qu’elle ne l’est déjà, et qu’elle n’ose tout, soit directement et à face découverte, soit par l’insolence et l’injustice de ses visites et de ses croisières, et par des insultes de détail qu’elle ne voudra ni ne pourra réparer, et que nous ne pourrons ni ne voudrons dévorer. Les Anglais ne respectent que ceux qui peuvent se faire craindre. »

La guerre avait un certain attrait pour M. de Vergennes.

« Si, dit-il, les dispositions du roi de France et du roi d’Espagne[2] étaient guerrières, s’ils étaient disposés à se livrer à l’impulsion de leur intérêt, et peut-être à la justice de leur

  1. De Witt, Jefferson, p. 494.
  2. En vertu du pacte de famille, les deux cours agissaient ensemble.