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Sir Edmond Andros avait imposé des droits sur les marchandises apportées dans le Delaware, qui faisait alors partie de la colonie ; les colons déclarèrent la taxe illégale et inconstitutionnelle parce qu’elle avait été établie sans leur consentement. Le duc d’York, disent-ils, a accordé aux propriétaires Berkeley et Carteret, non-seulement la terre, mais les pouvoirs du gouvernement.

« Cela seul, ajoutent-ils, pouvait nous décider à acheter la terre, et la raison en est simple. Pour tout homme prudent, la question du gouvernement a plus d’importance que la question du sol ; qu’est-ce que de bonnes terres sans de bonnes lois ? Plus la terre serait bonne, plus la condition serait mauvaise. Il nous faut garantir aux peuples un gouvernement facile, libre et sûr en ce qui touche leur propriété spirituelle aussi bien que temporelle, c’est-à-dire une liberté de conscience que rien ne trouble, une possession inviolable de leurs droits civils et de leur liberté ; autrement qu’y a-t-il d’encourageant dans un désert ? Ce serait une folie que de quitter un pays libre, riche, civilisé, pour planter la solitude, et risquer de grosses sommes afin de donner à autrui le droit de nous taxer à son plaisir… Le droit naturel et la raison s’opposent à cette doctrine par tout le monde, car cela équivaut à dire qu’un peuple libre par la loi, dans sa patrie et sous son prince, est à la merci du prince dans les plantations.

« Si l’on peut nous imposer sans loi, si l’on nous exclut du droit qui nous appartient de voter l’impôt en notre qualité d’Anglais, quelle sécurité avons-nous pour rien de ce que nous possédons ? Rien n’est à nous ; nous sommes serfs à merci non-seulement pour la terre, mais pour notre argent. De pareils abus ont ruiné les gouvernements, et n’en ont jamais élevé aucun à une véritable grandeur. »

Un siècle de cette pratique libérale avait singulière-