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froid et à la neige ?… Je puis assurer à ces messieurs qu’il est plus aisé et moins fatigant de rédiger des critiques, quand on est assis dans une chambre commode, au coin d’un bon feu, que de camper sur une colline froide et humide, et de dormir sous la glace et la neige, sans vêtements et sans couvertures. Quelle que soit l’indifférence de ces messieurs, tant de privations et de souffrances me touchent profondément ; c’est du fond du cœur que je plains des misères que je ne puis ni secourir ni prévenir. »

Ce fut au milieu de ces souffrances que Washington eut recours aux réquisitions forcées. Dans ces mesures rigoureuses, mais nécessaires, il mit une modération extrême ; c’en fut assez, cependant, pour exciter le mécontentement et les plaintes de ses amis les plus chauds. Quant à lui on voit dans ses lettres toute sa répugnance, il déclare que retourner à ce moyen extrême lui semblerait le plus grand malheur de sa vie. Il avait l’âme civile, c’est là sa grandeur.

La décision qu’avait prise Washington d’établir ses quartiers d’hiver en pleine campagne, fait autant d’honneur à sa sagacité qu’à sa fermeté. Il ne manquait pas de gens qui, au Congrès, s’étonnaient que l’armée ne marchât pas, et dans l’armée il ne manquait pas d’officiers qui auraient voulu s’installer à York ou à Lancastre, pour y trouver les commodités de la vie. Mais Washington était décidé à tenir l’ennemi en haleine, pour l’empêcher d’étendre ses conquêtes et son influence.

Il s’établit donc à Valley-Forge, forte position entre les collines et les rives de la Schuylkill, a vingt milles seulement de Philadelphie. C’était un désert et une forêt. Il fallait toute l’autorité de Washington pour décider