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voyages, qu’en décembre 1779 son hôtelier, dans le Maryland, lui présenta une note de 732 livres (18 300 francs), et qu’il la paya avec 4 guinées et demie, c’est-à-dire 112 fr. 50 c.

Le Congrès qui, par sa négligence, avait laissé venir un pareil état de choses, repoussait avec dédain, et comme une injure, la crainte d’une banqueroute.

« Une république sans foi, une république banqueroutière, est-il dit dans une adresse du Congrès à ses constituants, datée du 13 septembre 1779, ce serait une chose sans exemple dans l’histoire du monde. Qu’on ne dise pas, qu’on ne puisse jamais dire que l’Amérique n’a pas été plus tôt indépendante qu’elle est devenue insolvable[1]. » Belles paroles, mais qui ne précédèrent la banqueroute que de deux ans.

Les effets de ce papier-monnaie ne se firent pas attendre ; Washington nous en a laissé la triste peinture :

« S’il me fallait faire la peinture du temps et des hommes d’après ce que j’ai vu, ce que j’ai entendu et ce que je sais, je dirais, en un mot, que l’oisiveté, la dissipation et l’extravagance s’en sont emparés ; que la spéculation, le péculat et une soif insatiable de richesses l’emportent sur toute autre considération, et dominent tous les hommes ; que des disputes de partis et des querelles de personnes sont la grande affaire du jour ; tandis qu’on néglige et qu’on ajourne de semaine en semaine et de jour en jour tout ce qui touche les fondements mêmes de l’État, une dette énorme et qui grossit sans cesse, des finances ruinées, un papier déprécié, la perte de tout crédit. En ce moment notre papier perd 50 p. 100 par jour, dans cette ville ; je ne serais pas surpris que dans quelques mois il

  1. Lord Mahon, VI, 288.