Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 2.djvu/437

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fait ; mais il se hasarderait à dire qu’ils méritaient d’être payés par l’ennemi[1]. »

Lord North repoussa avec dédain cette injure gratuite. « Il nous est arrivé, dit-il, un désastre en Virginie ; faut-il donc nous coucher à terre et mourir ? Non, ce malheur doit nous pousser à l’action ; unis, nous pouvons tout sauver ; en nous abandonnant au désespoir, tout est perdu. » Fox l’avait menacé d’une accusation et de l’échafaud, cela ne l’effrayait guère ; il maintiendrait jusqu’au bout les droits et l’autorité législative du Parlement. La guerre d’Amérique était malheureuse, elle n’était pas injuste.

Burke fit une réponse pleine d’ironie et de passion. Les paroles du ministre, dit-il, lui avaient glacé le sang, et troublé l’âme. »

« Grand Dieu, s’écria-t-il, nous parlera-t-on encore des droits pour lesquels nous avons fait la guerre ? Oh ! les droits excellents ! oh ! les droits précieux ! Précieux sans doute, car ils nous coûtent assez cher ! précieux, car l’Angleterre les a payés de la perte de treize colonies, de quatre îles, de cent mille hommes, de 1 750 millions. Oh ! les droits merveilleux, qui ont fait perdre à la Grande-Bretagne l’empire des mers, cette grande et solide supériorité qui faisait plier le monde devant nous ! Droits inestimables, qui nous ont ôté notre rang parmi les nations, notre importance au dehors, notre bonheur au dedans ; qui ont ruiné notre industrie, notre commerce et notre navigation ; qui du plus florissant empire ont fait la puissance la plus réduite et la moins enviable de l’univers ! Droits merveilleux, qui nous prendront bientôt le peu qui nous reste.

  1. Lord Mahon, VII, 132.