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Cette placidité ne se démentit pas ; et quelques jours plus tard, lorsque la Gazette de la cour annonça qu’il avait plu au roi d’appeler auprès de lui un nouveau ministère, ministère pris parmi les gens que George aimait le moins, lord North dit plaisamment : « On m’a reproché avec injures de mentir dans les gazettes ; mais il y a plus de mensonges dans celle-là qu’il n’y en eut jamais dans toutes les miennes. Hier, il a plu à Sa Majesté de nommer le marquis de Rockingham, M. Charles Fox et le duc de Richmond ! »

Lord North était de ces esprits médiocres qui perdent gaiement les empires. Sa bonhomie l’excuse ; mais elle n’excuse pas un pays qui souffre à sa tête une pareille incapacité.

En acceptant le ministère, lord Rockingham avait stipulé qu’on reconnaîtrait l’indépendance des colonies ; mais ce ne fut pas lui qui fit ce grand acte ; il tomba malade le 3 juin 1782 et mourut le 1er juillet, au moment où l’on recevait en Europe la nouvelle d’une grande victoire navale remportée dans les Antilles par l’amiral Rodney sur la flotte française. C’était la défaite de la plus belle flotte que la France eût jamais mise à la mer ; la Ville-de-Paris, le plus beau vaisseau du dernier siècle, construit et offert à Louis XVI par Paris, avait été pris, et l’amiral, le comte de Grasse, avait été obligé d’amener son pavillon et de se rendre prisonnier. Il n’y avait plus que trois personnes sur le pont qui ne fussent pas blessées, et de Grasse était une des trois.

Mais cette victoire brillante, et qui consolait l’amour-