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des officiers publics étroitement maintenus dans le respect du peuple et de la loi.

Qui établit ces limites ? C’est la constitution. En France, une constitution n’a jamais lié les représentants ; la loi du lendemain défait et viole la constitution de la veille ; en Amérique la constitution est la loi des pouvoirs publics ; ils ne peuvent sortir du cercle où elle les a enfermés.

Mais, dira-t-on, où est le pouvoir qui bridera le législateur ? Celui qui fait la loi n’est-il pas souverain par cela même ; rien peut-il limiter son action ? Si spécieuse qu’elle soit, cette opinion n’est qu’un préjugé français. Les Américains ont établi une autorité qui maintient dans l’obéissance le législateur lui même ; cette autorité, c’est le pouvoir judiciaire. Depuis Montesquieu, nous répétons sans cesse qu’il y a trois pouvoirs dont la séparation importe à la conservation de la liberté ; mais qu’on me montre une constitution où la justice ait jamais été un pouvoir politique ? Comment, en effet, la chose serait-elle possible quand on a établi que les Chambres sont le peuple, et qu’on a mis dans leurs mains la souveraineté absolue ?

Je me borne à indiquer ces deux questions parmi beaucoup d’autres ; cette indication suffira pour montrer combien de choses nous pouvons apprendre de l’Amérique. Notre éducation politique est à refaire. Depuis soixante-quinze ans le monde a marché ; nous en sommes encore à des théories usées. Nos pères avaient une excuse, ils ne savaient pas quels fléaux ces erreurs portaient dans leurs flancs ; mais nous qui avons l’expérience de tant de révolutions, ne devrions-nous pas être plus sages, et nous faudra-t-il toujours aller à l’abîme par le même chemin ?

Qu’est-ce, par exemple, que ces assemblées constituantes qui suspendent la vie de la nation, arrêtent le