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cèrent à cette prétention légitime ; ils se contentèrent de demander cinq à six ans de solde, de manière à leur tenir lieu de retraite. Arrivés à Philadelphie, les délégués de l’armée trouvèrent là deux partis qui commençaient à se dessiner et qui devaient avoir une grande influence sur la formation de la constitution.

Il y avait dans le congrès de 1782 des hommes qui, jusque-là, n’étaient pas entrés dans la vie politique, comme Hamilton, Madison, Gouverneur Morris et quelques autres. C’était une nouvelle génération qui n’avait ni toutes les idées ni toutes les passions de ceux qui avaient fait la révolution. Comme les patriotes de 1775, Hamilton et ses amis avaient combattu pour affranchir l’Amérique ; mais, une fois la paix faite, on ne s’entendait plus sur l’organisation du gouvernement. Les hommes qui avaient commencé la révolution étaient des colons qui avaient appartenu à des provinces parfaitement distinctes, des Virginiens, des gens de la Nouvelle-Angleterre, de la Pensylvanie, de la Caroline. Les hommes qui avaient grandi pendant la guerre n’avaient vu qu’une chose, la patrie. Depuis dix ans, l’idée coloniale avait faibli, l’idée d’union avait pris le dessus. Ces jeunes patriotes avaient ce qu’on a appelé plus tard l’esprit continental, tandis que ceux qui avaient déclaré l’indépendance étaient animés de l’esprit colonial. Cette différence d’idées parut dans l’affaire des retraites. À cette pétition de l’armée, Hamilton et ses amis prêtèrent une oreille favorable ; ils voyaient un intérêt très-grand à faire de l’armée le créancier de la confédération, et non de chaque État ; car, disait Ha-