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moyen usé qui ne pouvait faire illusion à personne ; il était nécessaire de recourir au système de revenu de 1783, sans quoi le congrès allait se trouver sous le coup d’une banqueroute odieuse. Le congrès adressait cette protestation suprême à la nation en lui disant qu’elle allait décider elle-même de son sort. Ou elle payerait ses dettes et sauverait son honneur, ou il serait prouvé que l’Amérique n’était pas une nation, mais un assemblage fortuit de provinces impuissantes et hors d’état de faire face à leurs engagements.

Cet appel fut entendu par douze États sur treize ; mais il y en eut un, et non pas le moins riche l’État de New-York, qui refusa d’entrer dans cette voie : non qu’à New-York on ne voulût pas se soumettre au congrès, l’opinion commençait à lui devenir plus favorable, mais New-York voulait que ce fussent les États particuliers qui fissent percevoir l’impôt par leurs collecteurs. En d’autres termes, c’était toujours l’intérêt provincial qui l’emportait sur l’intérêt commun, et puis New-York trouvait plus commode de répartir l’impôt sur certains objets plutôt que sur certains autres, par exemple sur le sucre qui se répandait dans toute l’Amérique, plutôt que sur les cuirs qui occupaient les ouvriers de l’État. À cela se joignait cette crainte inhérente à l’esprit américain de voir un pouvoir central s’organiser au-dessus des États. On rêvait de tyrannie. Hamilton, qui n’était pas né aux États-Unis, mais qui avait été adopté par l’État de New-York, et à qui il fallait, par conséquent, un courage particulier pour combattre les préjugés de sa patrie d’adoption, fit une