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Vous reconnaissez cette idée absurde, qui renaît si souvent dans les temps d’épidémie : on pend les médecins sous prétexte qu’ils sont cause de la maladie.

Vous voyez où l’on en était arrivé. Pas d’argent, et partout la misère. Dans un moment de désespoir, on avait autorisé le payement en nature qui est le plus funeste de tous les payements, car il ruine le débiteur en lui ôtant sa dernière ressource et donne au créancier une chose sans valeur. Le mécontentement grandissait avec la souffrance ; on menaçait les cours de justice, on demandait l’abolition des dettes et un papier-monnaie. Dès l’automne 1786, il fut visible qu’on approchait d’un soulèvement.

Ce fut alors que Henri Lee écrivit à Washington, qui était toujours la ressource universelle. Nous avons sa réponse, qui est fort belle. On lui demandait d’user de son influence, il répondit : « L’influence ? à quoi bon ? L’influence n’est pas le gouvernement. Commencez par avoir un gouvernement qui assure la liberté, la propriété des citoyens, sans cela attendez-vous à ce qu’il y a de pire au monde. Et quant aux débiteurs, la conduite à tenir avec eux est très-simple : informez-vous de l’état des choses, donnez-leur satisfaction s’ils ont raison, mais non s’ils ont tort, et enfin, s’ils attentent à la liberté des citoyens, vous êtes un gouvernement, agissez. »

Ce conseil fut entendu : le Massachusetts dut son salut à l’énergie de son gouverneur. Ce premier magistrat se nommait James Bowdoin et descendait d’une famille de réfugiés français. Bowdoin vit que la crise approchait ;