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est dans tous les pays où il y a une Église d’État. L’Église était restée attachée au pouvoir qui la payait, et le peuple avait pris en horreur cette Église qui, au commencement de la révolution, s’était trouvée royaliste quand tout le monde était républicain. Il y avait donc peu de sympathie pour cette Église. Or, un homme qui n’était pas un bon chrétien, il faut l’avouer, mais qui était un grand ami de la liberté, Jefferson, proposa un bill pour l’établissement de la liberté religieuse. C’est à lui que se rattache un mouvement qui, aujourd’hui, ne fait que commencer chez nous. Jefferson partait d’une idée parfaitement juste, mais que des siècles de préjugés ont obscurcie en Europe : c’est qu’il y a certaines choses qu’il n’appartient pas à l’État de régler, et, parmi ces choses, les rapports de l’homme à Dieu, les droits de la conscience. Il faut donc mettre en dehors de la politique la liberté de conscience ; or, cette liberté implique nécessairement pour chacun le droit de se réunir avec ceux qui pensent de la même façon, et par conséquent le devoir de payer son Église, sans demander à un tiers qui pense autrement que lui de contribuer à l’entretien d’un culte qui n’est pas le sien. Cette idée fut accueillie avec un certain étonnement dans l’assemblée de Virginie ; on ne voulait pas aller aussi loin que le demandait Jefferson. Le bill fut ajourné. L’année suivante, Jefferson était en France ; Madison reprit la question. Madison n’était pas de la trempe de Jefferson. C’était un esprit modéré, et qui, à cause de sa modération même, faisait réussir les causes auxquelles il s’attachait. Il em-