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considérable, et plus est grande la proportion des membres qui ont peu d’instruction ou d’expérience. C’est précisément sur ces côtés faibles que l’éloquence et l’adresse de quelques hommes agissent avec toute leur force. Dans les républiques de l’antiquité, où le peuple tout entier s’assemblait en corps, on voyait d’ordinaire un seul orateur, un politique habile, gouverner avec autant d’empire que s’il avait eu le sceptre dans la main.

« Plus une assemblée sera foule, plus elle partagera cette faiblesse des réunions populaires. L’ignorance y sera la dupe, la passion y sera l’esclave du sophisme et de la déclamation. Le peuple ne peut pas donner dans une erreur plus grossière qu’en supposant qu’à multiplier le nombre des représentants au delà d’un certain chiffre, il fortifie la barrière qu’il veut élever contre le gouvernement d’un petit nombre.

« L’expérience universelle nous apprend, au contraire, que dans l’intérêt du salut public, de la communication des mandataires et des mandants, de la connaissance des intérêts particuliers, il faut sans doute un certain nombre de représentants ; mais que, passé ce nombre, toute addition nouvelle va justement contre le but qu’on s’est proposé. La forme, l’apparence du gouvernement peut devenir plus démocratique, mais l’esprit qui l’anime devient plus oligarchique. La machine est agrandie, mais les ressorts qui en dirigent les mouvements sont moins nombreux et plus secrets[1]. »

Je regarde cette observation d’Hamilton comme d’une justesse parfaite. Voyez notre première Constituante. Il est évident que plus d’une fois Mirabeau a dominé et entraîné l’assemblée. Toutes les fois que vous aurez une assemblée nombreuse, cette assemblée sera foule et acceptera un chef sans le discuter. Comme le disait

  1. Federalist, n° 58.