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exerce un pouvoir absolu. Il est tenu, comme le sénat romain, par le respect des précédents. C’est une force que nous ne connaissons pas depuis cent ans. Nous vivons sous l’empire de la révolution, et nous avons vu changer tant de gouvernements que nous n’avons aucun respect pour le passé. Nos pères n’avaient pas cet esprit ; nous voyons que, jusqu’au quinzième siècle, on fait jurer aux princes et aux rois le respect des vieilles coutumes. Jusqu’à la révolution française, on voit le parlement alléguer les lois fondamentales de la monarchie française, lois mal définies, mais que nos rois eux-mêmes se reconnaissaient dans l’heureuse impuissance de changer. La royauté est absolue en fait, elle ne l’est pas en droit.

Il en est de même en Angleterre. Le parlement peut faire beaucoup de choses, mais il semblerait énorme qu’il agît contre ce qui a été fait par les ancêtres en faveur de la liberté. Cette barrière existait à Rome, et presque dans le même sens. L’expression mores majorum ne veut pas dire autre chose que les précédents. Jusqu’au moment où la démocratie fut triomphante dans la république romaine, le sénat, les tribuns ne pouvaient rien faire contre les précédents. L’empire seul fut au-dessus des lois, et cela par une idée qui répond aux nôtres. L’empereur, représentant du peuple, se proclamait absolu comme la nation même dont il absorbait en lui tous les droits.

En Angleterre, les précédents sont tout-puissants. Il y a en outre l’opinion qui maintient le parlement dans le respect de la nation ; par conséquent, s’il y a là une