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un certain point, on peut faire pour être député, mais non pour être magistrat. Le candidat se trouve exposé aux propositions les plus étranges. Ainsi vous savez qu’il y a dans certains États une loi, la loi du Maine, qui défend l’usage de tout spiritueux. Cette loi a été adoptée par certaines législatures, elle est très-désagréable à certaines parties de la population, notamment aux gens d’origine allemande. Eh bien, on y a dit aux juges : « Oui, nous vous nommerons, mais à la condition que vous n’appliquerez pas la loi. » Dès que vous soumettez la nomination du juge à l’élection, vous n’avez plus de justice.

Cela pourrait se corriger à la longue si les magistrats étaient inamovibles, parce que, quand un homme appartient à un corps, précisément parce que ses antécédents ont été les plus éloignés des traditions de ce corps, il est celui de tous qui les épouse avec le plus de chaleur. C’est à peu près comme les renégats, qui sont toujours les plus religieux de tous les hommes dans leur nouvelle religion ; mais, dans la plupart des nouveaux États, les fonctions judiciaires sont à la fois électives et temporaires : double abus. Dans la constitution fédérale, on a eu bien soin d’établir l’inamovibilité ; on a décidé que les magistrats resteraient en place tant qu’ils se comporteraient bien, during good behaviour. C’est la formule de l’inamovibilité[1].

Aux États-Unis, un juge ne peut être destitué par le

  1. C’est la traduction de la vieille phrase latine quamdiu se bene gesserint, opposée au durante beneplacito, c’est-à-dire durant notre bon plaisir.