Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 3.djvu/564

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ne dit pas : « Tel droit n’appartient pas aux États, » par exemple : « Il est interdit aux États de faire du papier-monnaie, » voici comment on raisonne en Amérique : « La constitution autorise le Congrès à faire telle chose, elle est muette sur tel point ; donc, en ce point, le droit appartient au peuple ou aux États, attendu que le silence de la loi profite au peuple et aux États. Ce silence prouve qu’ils n’ont point abandonné leur droit en faveur de l’Union. » Il en est de même pour les constitutions particulières ; tout ce qui n’est pas délégué à l’État est réservé au peuple.

Vous voyez combien ces deux amendements donnent un caractère spécial à la constitution. Aux États-Unis, tous les pouvoirs sont délégués, on ne peut les étendre ; le Congrès doit se renfermer dans la lettre de la loi. Loin de vouloir déléguer au Congrès toute la puissance du pays, on a pensé au contraire à l’enfermer dans un cercle qu’il ne puisse pas franchir. C’est le contraire chez nous. Par exemple, la constitution de 1848 déclare que le peuple français délègue le pouvoir législatif à une assemblée unique. Il n’y a aucune restriction. Voilà donc une assemblée qui fera de nous ce qu’elle voudra, et qui pourra légalement, sinon constitutionnellement, déporter les citoyens sans les faire juger par un jury. Où est la garantie de la liberté ? Et chez nous qu’est-ce que la loi ? Nous la définissons comme faisait la constitution de l’an III : la volonté générale exprimée par la majorité des citoyens ou de leurs représentants. C’est là une grande erreur, car les représentants ne sont pas toujours les représentants de la majorité du pays. Vous leur donnez