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qu’une nation qui voit un peuple s’enrichir par la liberté commerciale s’en tiendra longtemps à une admiration platonique ? Non, il lui faudra sa part de cette vérité nouvelle qui enfante la prospérité. Il en est de même pour la liberté politique. S’il est vrai qu’elle donne la paix, la moralité, la richesse, pourquoi donc en laisserions-nous le monopole à des peuples qui ne sont ni mieux doués, ni plus généreux que nous ?

Enfin, il y a une dernière raison. Je pensais surtout à mon pays, à la France. Les peuples ne sont pas faits pour vivre dans l’isolement ; il leur faut apprendre à se connaître et à s’estimer les uns les autres. Ce n’est pas seulement pour les choses matérielles que les peuples gagnent à commercer ; il y a aussi un commerce d’idées qui est plus nécessaire que tous les autres, et c’est dans celui-là surtout que l’échange fait la fortune des deux parties.

J’ai pensé, dès le premier jour, au danger de cette étude. Quand on parle des peuples étrangers pour en faire l’éloge, on blesse, en France, certaines susceptibilités. Nous avons, en France, des gens très-honorables qui, à tout éloge de l’étranger, à toute critique de nos défauts (car nous en avons), sont toujours prêts à vous répondre : « Je suis Français. » On appelle cela du chauvinisme, quand on n’est pas poli ; mais quand on est poli, cela s’appelle un excès de patriotisme, ce qui veut dire aveuglement ou ignorance. Au fond cela n’est pas sérieux. Est-ce que dans toutes les branches de l’activité humaine nous ne sommes pas sans cesse occupés à chercher ce que nous pouvons imiter ? En peinture,