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Page:Laboulaye - Locke, législateur de la Caroline.djvu/28

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tions essentielles au maintien de la liberté ; c’est la seule garantie contre l’usurpation ou la tyrannie du Parlement, la seule manière de maintenir la législature dans le respect de la Constitution et du pays ; c’est aussi le seul moyen connu de tempérer la démocratie et de l’empêcher de se perdre par l’entraînement ou la mobilité de ses passions. Mais l’hérédité n’est nullement une condition nécessaire d’existence pour une seconde Chambre, quand les mœurs ne le demandent pas ; une Chambre de législateurs héréditaires, dans la France de 1815, c’était, comme les landgraves et les caciques de la Caroline, l’importation d’une institution anglaise sur une terre aussi démocratique que celle de l’Amérique, et qui, elle aussi, rejetait l’inégalité.

Comparons maintenant la Constitution que Locke imagina pour la Caroline, avec celles qui s’établirent pour ainsi dire d’elles-mêmes dans les colonies d’Amérique, et nous verrons de suite quelle est la différence d’une loi produit naturel des circonstances, et d’un système artificiel. Dans toutes les colonies nous trouvons une organisation essentiellement pareille, un gouverneur dépositaire du pouvoir exécutif, un Conseil ou chambre supérieure, mêlé tout à la fois à l’administration et à la législation, enfin une assemblée nommée par le suffrage universel des planteurs. C’est la Constitution de la métropole, mais débarrassée des privilèges de l’aristocratie et du clergé, car la noblesse et l’église d’Angleterre n’ont pas émigré avec les nouveaux colons ; c’est en même temps un régime simple, naturel, d’une application facile, et qui se prèle si bien à la satisfaction de tous les besoins nationaux, qu’aujourd’hui encore, après deux siècles, il subsiste tout entier sous des noms peu différents. Rien de forcé, point de combinaisons étranges, point de castes, point de privilèges ; mais que de vérités politiques découvertes par l’expé-