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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/127

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leurre et que les chrétiens n’ont de commun que le nom[1]. Les manifestations diverses du mouvement gnostique ne lui ont pas échappé. Dans certains textes que transcrit Origène[2] on perçoit un écho des doctrines docétistes, qui niaient la réalité de l’humanité de Jésus. Celse revient à plusieurs reprises sur les idées de Marcion[3] ; il en tire même, à la grande indignation d’Origène, une image bouffonne, celle du Dieu créateur et du Dieu de Marcion se chamaillant comme dans ces combats où l’on met des cailles aux prises ; puis, affaiblis par le poids des années et déjà presque en enfance, se retirant du champ de bataille où ils laissent à leurs fils le soin de vider leur querelle[4]. Il cite encore les Valentiniens, les Simoniens et plusieurs autres sectes dont Origène avoue que, fort expert en la matière, il ne sait personnellement rien[5]. — Nul doute enfin que Celse n’ait essayé de faire parler les fidèles eux-mêmes, de les amener à définir, dans des conversations privées, leurs propres croyances. Origène se déclare convaincu (et il s’en désole) que plus d’un des griefs mis en avant par Celse lui vient d’esprits simples et sans culture, qui n’ont su lui donner du christianisme qu’une vue chétive, et de la Bible qu’une conception étroite et insuffisante[6].

  1. III, 12. Celse touche ici un point fort douloureux pour les chrétiens de stricte orthodoxie. Tertullien, qui écrit une vingtaine d’années à peine après lui, déplore ces dissidences, qui entament le bloc chrétien et ravalent la doctrine au niveau des opinions contradictoires des philosophes (voir Apologeticus, XLVII, 9).
  2. II, 61.
  3. Surtout VI, 54 et 74 ; VII, 18 et suiv.
  4. VI, 74.
  5. V, 62.
  6. I, 12 ; III, 44 ; VI, 53 ; VII, 27.