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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/370

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Au moment de décrire la physionomie morale de Julien, on ne peut se défendre de quelque embarras. Peu de personnalités antiques ont intéressé la postérité autant que la sienne. Et il n’en est guère qui aient été aussi diversement comprises. Pour s’en convaincre, il suffirait d’analyser la conception que se sont formée de Julien, dans les temps modernes, un historien comme Voltaire, un poète comme A. de Vigny, un dramaturge, comme Ibsen[1].

II

Mais écoutons seulement le témoignage des textes, sans essayer à leur propos de chimériques « reconstitutions ». Que nous livrent-ils des intentions de Julien, de ses pensées intimes et des motifs qui en déterminèrent le cours[2] ?

Et d’abord Julien fut-il un prince « tolérant » ?

Voltaire le jugeait tel. De même, un historien moderne, comme Vacherot[3] ; un critique littéraire, comme Anatole France[4]. Et sans doute se croyait-il lui-même fort respec-

  1. J’ai esquissé cette comparaison dans la Revue des Questions Historiques du 1er octobre 1930, p. 257-261.
  2. Je désigne par les noms de Bidez-Cumont le recueil (non traduit) qu’ont publié ces deux savants dans la collection des Universités de France, Iuliani imperatoris Epistulae, Leges, Poematia, Fragmenta varia, Paris, 1922, et par le nom de Bidez, les Lettres et Fragments de l’empereur Julien, dans la même collection, texte et trad. franç., Paris, 1924. Pour les autres traités de Julien je renvoie à l’édition Hertlein, Leipzig, 1877, sauf pour le traité contre les « Galiléens », qui est cité d’après C. J. Neumann, Leipzig, 1880.
  3. Hist. critique de l’École d’Alex., Paris, 1846, II, 163. « Il avait horreur de la violence et de la persécution ; il pouvait être et il fut tolérant par bienveillance et par humanité, mais jamais par la neutralité d’un juge indifférent. »
  4. La Vie littéraire, IV, 261-262 : « Il unissait la tolérance à la foi et c’est une