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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/382

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philosophie néo-platonicienne depuis la grande époque de Plotin et de Porphyre. Ce ne sont qu’anges, archanges, démons, héros, apparitions d’êtres supra-terrestres, rites secrets, sacrifices, mantique, purifications, extases. « Le théurge, y lit-on, par la puissance des choses ineffables, ne commande plus aux êtres cosmiques comme un homme usant d’une âme humaine, mais en tant que prééminent dans le rang des dieux, il use de menaces supérieures à son essence propre[1]. » Les épiphanies divines étaient censées apporter à ceux qui en bénéficiaient dans une extase heureuse les plus précieux dons du corps et de l’âme : « Cette union théurgique, y était-il encore affirmé, s’obtient seulement par l’accomplissement de cérémonies ineffables, par des actes saints, dignes des dieux, qui sont bien au-dessus de toute raison, et par la force de symboles indicibles, que les dieux seuls peuvent comprendre[2]. »

Les anciennes liturgies des cultes traditionnels, interprétées, spiritualisées, sublimisées, récupéraient leur utilité et leur prestige ; et une unité factice était conférée à toutes les formes de la piété païenne[3]. L’ancienne mythologie était transposée en une métaphysique abstruse. La philosophie grecque elle-même — toutes différences effacées entre les penseurs — fut associée par contrainte aux élans de cette piété malsaine, comme si vraiment, depuis Orphée, l’hellénisme avait toujours formé un front unique et, animé du même esprit, avait poursuivi les mêmes buts. L’esprit critique d’un Porphyre, avec ses distinctions subtiles, ses scrupules, ses doutes, devenait chose dange-

  1. Trad. Pierre Quillard, p. 176.
  2. De Myst., éd. Parthey, p. 96, l. 17.
  3. Julien dira, à l’imitation de son maître : « Comme il n’y a qu’une vérité, ainsi n’y a-t-il qu’une philosophie » (Or., VI, p. 184 C, éd. Hertlein).