L’ordre même de l’univers suffit à l’imposer[1], et nulle pédagogie spéciale[2] n’est nécessaire pour que l’homme sente Dieu et croie en lui.
Certes, les Grecs ont débité sur le compte des dieux bien des fables absurdes[3]. Mais que dire des mythes mosaïques racontés dans la Genèse[4] ? Ce paradis planté par Dieu ; cette Ève, créée pour servir d’aide à Adam et qui devient la cause de sa perte ; ce serpent qui converse avec la femme (en quelle langue dialoguaient-ils donc ?) ; cette défense faite par Dieu à l’homme d’apprendre à distinguer le bien et le mal, comme si ce n’était pas là le rôle naturel et « l’œuvre propre » de la raison ; cette jalousie étrange que Dieu conçoit, quand ses créatures ont goûté du fruit de l’arbre : il n’est pas un de ces récits qui ne soit blasphématoire, à moins qu’ils ne cachent quelque allégorie, quelque θεωρία ἀπόρρηιος, ce que Julien s’avoue assez disposé à admettre.
La cosmogonie mosaïque est d’ailleurs incomplète et inconsistante. Moïse n’indique nulle part quelle est la nature des anges, quoiqu’il les présente ordinairement comme les serviteurs de Dieu ; il ne définit pas leurs fonctions[5]. Il donne l’impression que le Dieu des Juifs n’est le créateur d’aucun être incorporel et qu’il n’a fait qu’aménager une matière préexistante[6]. Comme l’idée de la création dans le Timée de Platon[7] est plus rationnelle