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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/80

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qu’un rhéteur de grande classe. Il eut l’honneur de parler devant Marc-Aurèle, qui le goûta fort. À la différence de beaucoup des sophistes de ce temps, il se refusait aux improvisations, et se donnait le loisir de rédiger à tête reposée des discours écrits en une langue toute classique, où il s’inspirait des plus purs modèles attiques. Il se piquait modestement d’unir en sa personne Platon et Démosthène, et se donnait comme « le premier des Grecs[1] ». C’était beaucoup dire ; mais qu’il ait été, en son genre, un véritable artiste, voilà ce qu’on ne doit pas lui refuser[2]. Le plus souvent cité des cinquante-trois Discours qui sont venus jusqu’à nous, c’est ce fameux Éloge de Rome, où il vantait le bonheur de son siècle, la sécurité, la prospérité que la Ville avait su faire régner partout, et la montrait reprenant et développant l’œuvre civilisatrice d’Athènes. — Saisi vers 156 par une crise de rhumatismes et une affection nerveuse dont il devait souffrir pendant près de dix-sept ans, il devint le dévot d’Esculape, et il fréquenta son sanctuaire de Pergame. Il avait la foi ; il se crut en correspondance directe et union intime avec le dieu, qui, par des visions et des songes, lui communiquait les directives utiles à sa santé. Et il ne nous fait grâce ni mystère de sa thérapeutique, y compris les clystères et les purges[3].

Son 46e Discours, composé sans doute peu après 180, enferme un morceau assez énigmatique où il s’en prend avec vigueur à certains détracteurs de l’Hellénisme. Cette tirade enflammée a été traduite tout au long par André Bou-

  1. Or. 51 (Dindorf, p. 582 D).
  2. Comp. Wilamowitz-Moellendorff, dans les Sitz.-Ber. de l’Acad. de Berlin, 1925, p. 341.
  3. Par ex. Discours Sacrés, II (Dindorf, p. 476).