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histoire naturelle

différence qui existe ordinairement entre cette légèreté et celle de l’eau salée s’évanouisse, et que la baleine ne puisse pas s’enfoncer.

Les habitans de plusieurs îles voisines du Kamtschatka vont, pendant l’automne, à la recherche des baleines franches, qui abondent alors près de leurs côtes. Lorsqu’ils en trouvent d’endormies, ils s’en approchent sans bruit, et les percent avec des dards empoisonnés. La blessure, d’abord légère, fait bientôt éprouver à l’animal des tourmens insupportables : il pousse, a-t-on écrit, des mugissemens horribles, s’enfle et périt.

Duhamel dit, dans son Traité des pêches, que plusieurs témoins oculaires, dignes de foi, ont assuré les faits suivans :

Dans l’Amérique septentrionale, près des rivages de la Floride, des sauvages, aussi exercés à plonger qu’à nager, et aussi audacieux qu’adroits, ont pris des baleines franches, en se jetant sur leur tête, enfonçant dans un de leurs évents un long cône de bois, se cramponnant à ce cône, se laissant entraîner sous l’eau, reparoissant avec l’animal, faisant entrer un autre cône dans le second évent, réduisant ainsi les baleines à ne respirer que par l’ouverture de leur gueule, et les forçant à se jeter sur la côte, ou à s’échouer sur des bas-fonds, pour tenir leur bouche ouverte sans avaler un fluide qu’elles ne pourroient plus rejeter par des évents entièrement bouchés.