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vue générale

lières, pour donner eux-mêmes l’existence à de nouveaux individus, ils n’en conservent pas moins l’association générale ; et les générations successives, rassemblées et liées par le sentiment, ainsi que par une habitude constante, forment bientôt ces bandes nombreuses que les navigateurs rencontrent sur les mers, sur-tout sur celles qui sont encore peu fréquentées.

Ces troupes remarquables présentent souvent, ou les jeux de la paix, ou le tumulte de la guerre. On les voit, ou se livrer, comme les bélugas, les dauphins vulgaires et les marsouins, à des mouvemens rapides, à des élans subits, à des évolutions variées, et, pour ainsi dire, non interrompues ; ou, rassemblés en bandes de combattans, comme les cachalots et les dauphins gladiateurs, ils concertent leurs attaques, se précipitent contre les ennemis les plus redoutables, se battent avec acharnement, et ensanglantent la surface de la mer.

Il est aisé de voir, d’après la longueur de la vie des plus grands cétacées, que, par exemple, deux baleines franches, l’une mâle et l’autre femelle, peuvent, avant de périr, voir se réunir autour d’elles soixante-douze mille millions de baleines auxquelles elles auront donné le jour, ou dont elles seront la souche.

La durée de la vie des cétacées, en multipliant, jusqu’à un terme qui effraie l’imagination, les causes du grand nombre d’individus qui peuvent être rassemblés dans la même bande, et former, pour ainsi dire, la