La monotonie de la marche était de temps à autre interrompue par des questions d’Alphonse à Pacôme.
— Est-ce maintenant, Pacôme, que tu veux boire, ou aimes-tu mieux attendre au printemps ?
— Pour étancher ma soif, je boirai le sang du premier ours que le franc-tireur Alphonse aura tué.
Puis à dix minutes d’intervalle.
— Tu n’es pas pour emporter à la maison le pic de bois ni l’écureuil. Nous allons être la risée de toute la paroisse.
Et Pacôme de répondre avec solennité :
— Je vais empailler ces deux fameux gibiers que je veux léguer à la postérité pour rappeler aux âges futurs les exploits de la recherche au Pic-du-Bois qui éclipsent ceux de la Toison d’Or.
Enfin nous arrivâmes à la maison plus morts que vifs, nageant dans notre sueur. On ne veut pas nous laisser boire de l’eau à la glace, mais seulement du lait, breuvage des enfants. Pacôme exhibe les trophées des chasseurs ; ma sœur, poêle en main, demande les perdrix promises. Heureusement que mon père était allé à la chasse lui aussi et avait rapporté un joli petit cochon de lait qui est le mets favori des jeunes chasseurs inexpérimentés. La veillée fut courte ; la prière menaçait de l’être, mais ma mère réclama le droit de Dieu.