Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/156

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Et je suivais des yeux cette haleine indécise
Se jouant sur l’abîme où dort l’âpre ouragan ;
Et j’ai dit : « Dieu permet à la plus faible brise
De rider ton front calme, ô terrible Océan !

« Puissant et vaste, il faut la foudre et la tempête
Pour soulever ton sein, pour courroucer tes flots ;
Et le moindre vent peut, de son aile inquiète,
Importuner ton onde et troubler ton repos.

« Des passions, poète, il faut aussi l’orage
Pour soulever ta muse et ton verbe irrité ;
Un souffle peut aussi, dans la paix qui t’ombrage,
Troubler ta quiétude et ta sérénité.

« Toute vague a son pli, tout bonheur a sa ride.
Où trouver le repos, l’oubli, l’apaisement ?
Pour cette fleur sans prix notre cœur est aride !
L’inaltérable paix est en Dieu seulement.

« Pour moi, je n’irai point demander à la terre
Un bonheur qui nous trompe ou qui nous dit adieu ;
Mais toujours je mettrai, poète au rêve austère,
Mon amour dans la Muse et mon espoir en Dieu ! »