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POÈMES ET PAYSAGES

Boire avec moi la paix qui tombe des grands chênes ;
Sur les mousses assis, mon front sur ses genoux,
Plongeant mes longs regards dans ses regards si doux,
Ah ! je ne rêve plus de vers !… Sous son sourire
Chante au fond de mon âme une ineffable lyre ;
Et des arbres, des fleurs, des grâces de l’été,
Mon œil ne voit, mon cœur ne sent que sa beauté !
Et dans ses noirs cheveux glissant un doigt timide.
J’y pose en frémissant quelque beau lys humide ;
Et, muet à ses pieds, et sa main sur ma main.
J’effeuille vaguement des tiges de jasmin ;
Et leur vive senteur m’enivre, et sur notre âme
Comme un vent tiède passe une haleine de flamme !…

Ô flammes de juillet ! soleils de volupté !
Saveur des baisers pris dans le bois écarté !
Ô chevelure moite et sous des mains aimées
S’épandant sur mon front en grappes parfumées !
Des fleurs sous la forêt pénétrante senteur.
Arbres de feux baignés, heures de molle ardeur.
Heures où sur notre âme, ivre de solitude.
Le calme des grands bois règne avec plénitude ;
Tranquillité de l’air, soupirs mystérieux.
Dialogue muet des yeux parlant aux yeux ;
Longs silences coupés de paroles plus douces
Que les murmures frais de l’eau parmi les mousses ;
Ô souvenirs cueillis au pied des chênes verts,
Vous vivez dans mon cœur, vous vivrez dans mes vers !