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Page:Lacerte - Bois-Sinistre, 1929.djvu/31

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BOIS-SINISTRE

— Très bien alors ! acquiesçai-je en souriant. Puisque vous m’offrez si généreusement de continuer à demeurer aux Pelouses-d’Émeraude, M. Philippe ; puisque le Docteur et Mme Foret approuvent l’idée ; puisque aussi, je ne dois pas être séparée de Mlle Brasier, je ne demande pas mieux que de me rendre à vos désirs, à vos conseils, à tous. Je ne commencerai pas même à me chercher une maison : j’attendrai au mois de mars pour ce faire.

Donc, nous continuâmes à demeurer aux Pelouses-d’Émeraude, Mlle Brasier et moi.

Mme Duverney, ma chère bonne vieille amie, me manquait à chaque instant et mon plus grand bonheur consistait à parler d’elle à ma compagne.

Mlle Brasier et moi nous nous entendions à merveille. On ne pouvait pas s’empêcher d’aimer cette bonne demoiselle, si aimable et si dévouée. Et puis, je l’avais dit à Philippe, cela m’eut brisé le cœur de quitter les Pelouses-d’Émeraude.

La veille de Noël, je reçus une grande caisse contenant des jouets et des bonbons pour mes petits pauvres ; c’était le cadeau de Philippe et, cette année encore, j’aurais un bel arbre de Noël.

Lorsque Philippe arriva, la veille de Noël, pour passer avec nous ce Jour des jours, l’arbre de Noël était en marche. Plus de trente enfants étaient présents et chacun rapporta avec lui des jouets et des bonbons en quantité.

Nous ne revîmes pas Philippe avant Pâques ensuite. Lorsqu’il partit cette fois-là, après avoir passé trois jours avec nous, il promit de revenir vers le 15 avril, car nous devions déménager dans une autre maison, Mlle Brasier et moi, dans les premiers jours de mai.

Mme Foret avait loué une maison pour moi, et quoique je n’eusse pas signé de bail encore, le Docteur Foret m’avait offert de s’occuper de tous les détails, pour moi.

Le 15 avril, ainsi qu’il l’avait annoncé lui-même, Philippe arriva aux Pelouses-d’Émeraude.

Le temps étant idéal, ce jour-là, je me promenais sur la terrasse, quand je l’aperçus. J’étais toujours si heureuse de le voir ! En quelques enjambés il m’eut rejointe.

— Ô Philippe ! m’écriai-je, dans ma joie de le revoir. Ainsi, vous avez tenu votre promesse ; vous êtes venu nous rendre visite, et à la date annoncée.

— Oui, Marita, j’ai tenu ma promesse… Il n’y avait pas de danger que je l’oublie d’ailleurs. Êtes vous contente de me revoir, Marita ?

— …Oui, Philippe, murmurai-je.

— Je suis ici… pour y rester, Marita, reprit-il gravement.

— Pour y rester ? Mais… Les Pelouses-d’Émeraude

— M’appartiennent… c’est cela que vous vouliez dire, n’est-ce pas ?

— Certainement !

— Eh ! bien, non ! Les Pelouses-d’Émeraude, c’est votre home, Marita… mais j’aimerais à le partager avec vous.

— Je… Je ne comprends pas, Philippe, balbutiai-je.

— Ma bien-aimée, fit-il, voulez vous devenir ma femme ?

— Je… Je…

— Marita, ma chérie, dites oui ! Dites que nous nous marierons bientôt !

— …Oui, Philippe… répondis-je. Quant à vous épouser bientôt…

— Y avez-vous des objections, mon aimée ?

— À cause du décès si récent de Mme Duverney…

— Quand sera-ce alors ?

— Pas avant le mois de décembre.

— Le mois de décembre ! Un siècle à attendre !

— Ça passera assez vite encore, mon Philippe, dis-je en souriant. J’ai mon trousseau à préparer, et… et une infinité d’autres choses à faire. Non, décidément, ça ne pourra pas avoir lieu avant décembre.

— Je me soumets à votre décision, ma Marita, répondit-il. Mais, à partir d’aujourd’hui, de cet instant, vous êtes ma chère fiancée, ne l’oubliez pas !

— Il est peu probable que je l’oublie, répliquai-je avec un sourire ému.

— Fixons la date au 1er décembre alors, Marita ?

Et je répondis : « oui ».

Donc, le 1er décembre suivant, nous nous mariâmes, Philippe et moi.

Mlle Brasier restait avec nous, comme compagne et surveillante de la maison ; son avenir était, ainsi, assuré et elle en était fort heureuse.

Inutile de le dire, le Docteur Foret n’avait pas loué une maison pour moi, car lui