— « Nous pouvons toujours essayer, Andréa, » répondit Mirville.
Arrivés à la maison, Andréa frappa à la porte, qui fut ouverte immédiatement par une femme, jeune encore, et d’aspect avenant. Peut-être cette femme avait-elle vu venir les deux hommes ; on aurait pu le supposer par l’empressement qu’elle mit à ouvrir.
« Entrez, messieurs, » dit-elle.
Yves et Andréa pénétrèrent dans une chambre assez spacieuse, d’une extrême propreté et confortablement meublée. Dans le fond de cette chambre, un homme à barbe grise était assis dans un fauteuil, les jambes enveloppées de couvertures ; cet homme avait l’air souffrant.
« Vous vendez du poisson ? » demanda la femme. « Il a l’air frais ; je l’achèterai bien… Combien ? »
Andréa allait fixer un prix pour le poisson, quand le maître de la maison leur demanda :
« Vous allez loin ? »
— « Nous allons un peu à la grâce de Dieu, » répondit Andréa.
— « Vraiment ! » s’écria l’homme. « Peut-être cherchez-vous de l’ouvrage ? »
— « Oui, nous cherchons de l’ouvrage, » répondit Yves.
— « Je suis le passeur de rio Ovapok, » dit l’homme ; « mais je suis incapable de faire mon métier : je souffre de rhumatisme et j’en ai pour plusieurs jours à souffrir, je crois… Mon neveu, qui a coutume de m’aider ou de me remplacer quand je suis malade, est parti auprès de sa mère qui est malade, mourante probablement… Que penseriez-vous de l’idée de me remplacer pour quelques jours, messieurs ? Je vous céderai la moitié des passages, puis nous vous logerons et vous nourrirons pendant le temps que vous resterez ici… Acceptez-vous ? »
— « Bien… » répondit Andréa, faisant semblant d’hésiter, quand cette proposition du passeur lui allait comme un gant « si mon compagnon accepte, ça me va… Qu’en dites-vous, Mirville ? »