de votre âme. Voulez-vous accroître leur vivacité ?
Cultivez votre esprit, augmentez le nombre de vos idées ;
en vain la nature vous aura accordé de beaux yeux, si
votre âme est froide, si votre esprit est vide, votre regard
sera nul et muet. Nous ne parlons icy que de cette
expression des regards qui ne tient ny à un sentiment
profond, ny à une sensation vide. On sçait assez que
les grands mouvements de l’âme ou des sens se
peignent dans les yeux en surmontant même les
obstacles qu’on leur oppose : Tel est le droit de
la nature ; l’art a cherché à l’imiter, et y est
parvenu : l’usage en est fréquent au théâtre, l’abus s’en est
glissé dans la société et les regards sont devenus
menteurs et perfides. Il s’en fait sentir jusque dans la
parure ; si l’on en croit les rapports des voïageurs, les
balladières de l’Indoustan scavent, à l’aide d’une poudre,
donner à leurs regards l’expression du plaisir, en
entretenant dans leurs yeux ces larmes brûlantes que la
volupté fait répandre ; et sans recourir à leur récit,
nous voïons autour de nous les femmes européennes
faire briller leurs yeux de l’ardeur du désir, par le reflet
du rouge placé sur leurs joües.
[Ici s’arrête la dissertation de Choderlos de Laclos.]
Page:Laclos - De l’éducation des femmes, éd. Champion, 1903.djvu/101
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