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Page:Lacroix - Contes littéraires du bibliophile Jacob à ses petits-enfants, 1897.djvu/300

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de longue date contre les insolences du bouffon du roi, était bien aise de tirer parti d’une occasion qui s’offrait de débarrasser la cour d’un personnage hostile et désagréable à tout le monde, mais que le roi tolérait et même soutenait, par déférence pour la reine-mère, qui le lui avait spécialement recommandé. Il s’agissait d’obliger Langeli à se reconnaître l’auteur de la malice infernale qu’on ne devait imputer qu’à lui, attendu que le marquis de Sévigné ne savait pas même quel était le papier qu’on avait vu tomber de sa poche ; or, ce jeune homme, depuis son arrivée à Versailles, avait été livré exclusivement aux étranges sévices de cet être malfaisant. Celui-ci niait effrontément ou refusait de répondre. La situation changea quand mademoiselle de Sévigné, qui était restée neutre jusqu’alors dans le débat, déclara que Langeli, en la menant avec son frère chez Madame, tenait à la main un papier roulé.


— Langeli, dit tout à coup le roi avec un visage menaçant et une voix terrible, si tu t’obstines à mentir ou à refuser de parler, je te ferai trancher la tête, comme à un rebelle et à un parjure !


— Ah ! sire, reprit le bouffon effrayé, vous ne ferez pas cela, pour l’honneur de votre très honorée mère, ma bonne maîtresse !


— Je le ferai tout à l’heure, poursuivit le roi, si tu ne déclares pas qui a fait la copie de cette exécrable chanson ; qui l’a signée du nom de Bussy-Rabutin, et qui l’avait glissée dans la poche du marquis de Sévigné, pour qu’elle tombât dans la chambre même de Son Altesse Royale.


— C’est moi, sire, c’est moi ! répondit Langeli, qui