Page:Lacroix - Contes littéraires du bibliophile Jacob à ses petits-enfants, 1897.djvu/331

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de sommeil qu’il leur avait promise, et à laquelle ils s’étaient déjà accoutumés depuis quatre nuits.


Avant qu’aucun bruit de pas eût retenti sous les voûtes du collège, avant qu’aucune lumière eût brillé aux fenêtres du pavillon de l’Horloge, Crébillon sortit de son lit bien chaud, avec un héroïque dévouement, qui bravait un froid de six degrés, accompagné de la bise du nord ; il alla, pieds nus, sur le palier, théâtre de ses premiers exploits, et parvint, non sans peine et sans danger, à enlever la cloche, dont il avait enveloppé soigneusement le battant avec son mouchoir ; puis, il se sauva entre ses draps, avec sa lourde capture, encore indécis de l’usage qu’il en ferait.

Sa première pensée avait été de faire disparaître la cloche pour toujours, comme pour la punir de tous les griefs que le sommeil des collégiens avait reçus d’elle, et il songeait à l’aller jeter dans le puits, mais il fut arrêté par cette réflexion que ce ne serait pas se délivrer à jamais d’une pareille ennemie, que de laisser la place à une autre cloche, peut-être plus grosse, plus bruyante et plus inattaquable. Il se détermina donc à lui chercher une cachette, où elle serait, du moins, en paix et en silence. Dans cette intention il s’habilla, sans faire de bruit, et quitta le dortoir, avec la cloche, qu’il avait peine à porter : il la porta cependant ou la traîna jusqu’aux greniers, et ensuite il la fit passer, par une lucarne, sur les