Page:Lacroix - Contes littéraires du bibliophile Jacob à ses petits-enfants, 1897.djvu/374

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renaître d’un moment à l’autre. La route, alternativement montueuse et déclive, était bordée tantôt par des clairières et tantôt par de grands bois touffus.


Tout à coup Valentin, qui se penchait hors de la carriole pour savoir s’il n’apercevrait pas sur la voie quelque chose d’insolite, vit briller dans les ténèbres deux points lumineux, semblables à des charbons ardents.


— Monsieur ! dit-il au colporteur, en baissant la voix : Monsieur, n’avez-vous pas un briquet, je vous prie ?


— Un briquet ? repartit le père Lalure, qui ne comprit pas le but de cette question inattendue. Nous avons bien affaire d’un briquet, quand notre cheval s’emporte ! Il s’en est fallu de peu que la voiture ne versât.


— Au nom du Ciel, Monsieur, reprit l’enfant, avec des gestes d’impatience, prêtez-moi un briquet ! Il n’est que temps !


— Tiens, le voici ! dit le colporteur, en le lui donnant. Mais, pour Dieu ! qu’en veux-tu faire ?


— Je veux, dit tranquillement l’enfant, en battant le briquet, je veux chasser le loup.


— Quel loup ? s’écria le père Lalure, qui ne parvenait pas à modérer le galop emporté de son cheval. Il y a un loup ? ajouta-t-il avec épouvante. Est-ce possible ? Je ne m’étonne plus de l’effroi de ma pauvre bête !


Valentin avait fait jaillir l’étincelle sur l’amadou et il s’empressa d’en approcher une allumette, qu’il lança tout enflammée en dehors de la voiture. On entendit un hurlement, et le cheval se mit à ruer, en courant plus fort.


— Dieu fasse qu’il n’y en ait pas une bande ! dit Valentin.