Page:Lacroix - La Perle de Candelair.djvu/126

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
118
LA PERLE DE CANDELAIR

certitude acquise, et s’en voulut d’avoir été dur, brutal même pour cette pauvre enfant. Il se fit un crime d’avoir fait pleurer ces yeux qu’il avait pris un si grand plaisir à embrasser. Il eût encore néanmoins recommencé si la chose eût été nécessaire, parce qu’avant tout, il ne voulait pas laisser toucher à son rêve, et que tout moyen lui semblait excusable pour en arriver à ses fins.

Il fut forcé de s’avouer que, quoique cruel, le parti qu’il avait pris était le seul qui dut empêcher Mariette, brusquement et très-certainement pour toujours, de pousser plus loin ses recherches et ses investigations à propos de ce qui le rattachait à Mme Malsauge.

Aussi, tout en regrettant de l’avoir fait pleurer, s’applaudissait-il de la barrière qu’il avait élevée entre elle et un ordre de sensations qu’il ne la croyait jamais appelée à comprendre, et au milieu desquelles à coup sûr, elle eût apporté de grandes perturbations, s’il n’y eût mis bon ordre.

N’ayant rencontré qu’un plaisir mêlé d’épines dans son intimité avec l’ouvrière, après n’avoir pas été heureux dans sa famille, Étienne se jeta plus que jamais dans la solitude : il vivait aussi heureux dans ses songes qu’il l’avait été peu dans la réalité.

La sauvagerie, qui, dès le principe, n’avait été qu’un masque, menaçait de devenir son visage pour tout de bon, lorsque Mme Malsauge, capricieuse comme le sont assez généralement toutes les femmes adulées et assez riches pour n’être guère arrêtées dans aucune de leurs fantaisies que par les choses reconnues matériellement impossibles, se piqua de ce qu’elle croyait être un jeu de la part du neveu de M. Letourneur, qu’elle ne pou-