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LE SECRÉTAIRE DU MINISTRE

Ce n’était pas un chemin facile à faire faire au jeune homme.

Mais il savait, le charmant et fin vieillard, que les idées qui s’ancrent le mieux dans l’esprit d’autrui, sont celles que l’on y fait entrer peu à peu, sans brusquerie, par le seul fait, je ne dirai même pas de la persuasion, mais de l’habitude, de la constance, de la continuité que l’on met à les leur dire, à les leur répéter.

Dès que le marquis parla de mariage à Étienne, le jeune homme bondit.

Le marquis le laissa bondir ; il lui rendit pour ainsi dire la main comme un bon cavalier l’eût fait à un cheval de race qui aurait pris de l’ombrage à une branche d’arbre, s’allongeant inopinément sur un chemin parcouru et connu depuis longtemps.

Sur cette belle indignation, le marquis laissa passer vingt-quatre heures ; puis, le lendemain, il revint à la charge avec son visage souriant, calme, tranquille, et qui semblait ne douter de rien.

— Mon cher enfant, dit-il à M. Jussieux, je vous verrais prendre femme avec une très-réelle et très-grande satisfaction.

— Vous me l’avez déjà dit, cher marquis, répondit Étienne ; je suis en effet persuadé que vous prendrez un très-grand et très-affectueux intérêt à tout ce qui se passera dans mon existence pour y apporter un changement quelconque.

— Le mariage, quand un homme a atteint un certain âge et qu’il a conquis une situation semblable à la vôtre, le mariage est comme la consécration de son état dans le monde, c’est une affirmation de sa valeur, de son