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l’originalité.

affranchissent le plus souvent. Comme le vrai but de Shakespeare est d’émouvoir ou d’enchanter, celui de Molière est de divertir et d’instruire.

Ce génie de l’action comique par la pantomime et par le langage, où Molière l’a-t-il connu, avant de l’amplifier et de le développer jusqu’à l’outrance ? Dans quelques anciens, assurément, Térence, Aristophane, Plaute surtout, mais bien plus encore dans les parades du Pont-Neuf, les mascarades des Italiens, les imbroglios de l’Espagne et les improvisations extravagantes, mais vivantes et franches, d’Alexandre Hardy. Sur ce point, comme sur d’autres, on est stupéfait, lorsqu’on le pratique assidûment, de l’étendue de ses connaissances directes et livresques dans le passé et dans le présent. Nul, en son siècle, sinon La Fontaine, n’a puisé, de tous côtés, avec autant d’avidité et d’intelligence, dans l’immense trésor des traditions françaises et étrangères. Il n’est point d’année où l’érudition contemporaine, infatigable et pointilleuse, ne découvre mille preuves de sa familiarité avec le répertoire des Italiens et des Espagnols. Quant à nous, Français, nous ne pouvons guère ouvrir un livre de comédies, tragédies, farces, moralités, satires, contes, fabliaux joués ou imprimés chez nous avant lui ou de son temps, sans être convaincus, par quelque imitation scénique ou réminiscence verbale, qu’il les a connus, à son grand profit.

Toutefois, dans notre ancien théâtre, l’action visible restait le plus souvent réduite, pour les entrée, sorties, jeux de scène, à des quiproquos grotesques, bousculades et bastonnades, pour les mono-