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MOLIÈRE.

sur tous les mondes, lui permet, en très peu de temps, d’y saisir et d’y fixer un tel nombre de types généraux et autour de ces types supérieurs, une telle quantité de types secondaires.

Molière, de retour à Paris, se trouva dans un milieu mondain et bourgeois, janséniste et cartésien, où l’étude et la connaissance de l’homme sentimental et moral semblaient la première des nécessités, la plus agréable et noble des occupations. On sait quel engouement pour les Portraits, en vers ou en prose, était alors de mode dans les livres comme dans les salons. Il s’enhardit vite, dans ce contact, à pousser à fond ses analyses psychologiques ; peut-être même y perdit-il un peu trop le goût et l’amour des choses extérieures, qui persista mieux chez les libres compagnons de sa jeunesse, La Fontaine, Cyrano, d’Assoucy, Chapelle, Bernier.

Mais s’il néglige parfois ou dédaigne la peinture physique de ses personnages, s’il nous laisse trop souvent ignorer leur âge, leur tempérament, leur profession, s’il oublie ou évite, presque toujours, de les engager dans une intrigue continue, réelle ou romanesque, dont l’intérêt remporterait sur celui de leurs caractères, en revanche, avec quelle pénétration, quelle force, quelle souplesse il analyse et reconstitue ces caractères ! La variété des types qu’il a fixés ainsi n’est pas moins prodigieuse que la précision et la sûreté avec lesquelles il les a fait agir et parler en concordance logique et soutenue de leur nature avec le milieu ou ils évoluent. Le plus souvent, ce caractère est défini, par quelques traits vifs et décisifs, sitôt que le personnage entre et