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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t4, 1925.djvu/230

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ŒUVRES DE JULES LAFORGUE

LIX

À CHARLES EPHRUSSI

Berlin, 24 12. 82.
Cher Monsieur Ephrussi,

Je travaille comme un nègre — pas cependant comme le nègre Dumas père. J’ai deux lectures régulièrement par jour avec livres à choisir, à lire d’avance, et trois journaux, et la Revue des Deux Mondes. Prélevez là-dessus le temps stupide de s’habiller deux fois, le temps stupide de manger (mais je me cache toujours, pour manger), le temps de dormir, les menues dépenses de temps, et vous verrez qu’il ne me reste pas grand’chose.

Je travaille la nuit à la lampe. C’est une infinie volupté. Toute la maison est endormie. À peine de temps en temps un fiacre sous les Linden. Quelquefois le clair de la lune sur la neige fine de Hausvogteiplatz. Alors j’entasse les feuilles de papier