Page:Laforgue - Moralités légendaires.djvu/130

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regarder plus haut que cette cour brillante ; les singes n’interrompirent nullement les scènes d’intérieur de leur phalanstère, les volières scintillaient assourdissantes ; les serpents n’en finissaient pas depuis une semaine de changer de peau ; et les écuries se trouvaient justement dégarnies de leurs plus belles bêtes, étalons, cavales et zèbres, prêtées à la municipalité pour une cavalcade en ce jour.

L’Aquarium ! Ah ! l’Aquarium par exemple ! Arrêtons-nous ici. Comme il tournoie en silence !...

Labyrinthe de grottes en corridors à droite, à gauche avec leurs compartiments en échappées lumineuses et vitrées de patries sous-marines.

Des landes à dolmens incrustés de visqueuses joailleries, des cirques de gradins basaltiques où des crabes d’une obtuse et tâtonnante bonne humeur d’après-dîner s’empêtrent en couples avec de petits yeux rigoleurs de pince-sans-rire...

Des plaines, des plaines d’un sable fin, si fin que soulevé parfois du vent des coups de queue d’un poisson plat arrivant des lointains dans un flottement d’oriflamme de liberté, regardé qui passe et qui nous laisse et qui s’en va, par de gros yeux, çà et là à fleur de sable, et dont c’est même tout le journal.

Et la désolation de steppes occupées d’un seul arbre foudroyé et ossifié où colonisent de toutes vibrantes grappes d’hippocampes...

Et, enjambés de ponts naturels, des défilés moussus où ruminent, vautrés, les carapaçons ardoisés de limules à queue