Page:Laforgue - Moralités légendaires.djvu/142

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Recueille-toi ! recueille-toi d’abord, Idée et Galbe, ô Cariatide des îles sans histoire ! suppliait-il.

Puis, il souriait à tous, en père heureux, l’air de dire : « Vous allez voir ce que vous allez voir », mettant les princes ses hôtes au courant, de façon fort décousue, où ceux-ci comprirent que, pour faire un sort à la petite personne en question, la Lune s’était saignée aux quatre veines, et qu’on la tenait d’ailleurs généralement (il y avait eu un Concile là-dessus) pour la sœur de lait de la Voie-Lactée (tout pour elle !).

Or, délicatement campée sur le pied droit, la hanche remontée, l’autre jambe infléchie en retard à la Niobide, Salomé, ayant donné cours à un petit rire toussotant, peut-être pour faire assavoir que surtout fallait pas croire qu’elle se prenait au sérieux, pinça sa lyre noire jusqu’au sang, et, de la voix sans timbre et sans sexe d’un malade qui réclame sa potion dont, au fond, il n’a jamais eu plus besoin que vous ou moi, improvisa à même :

« Que le Néant, c'est-a-dire la Vie latente qui verra le jour après-demain, au plus tôt, est estimable, absolvant, coexistant à l’Infini, limpide comme tout !

Se moquait-elle ? Elle continuait :

« Amour ! inclusive manie de ne pas vouloir mourir absolument (piètre échappatoire !), ô faux frère, je ne te dirai pas qu’il est temps de s’expliquer. D’éternité, les choses sont les choses. Mais qu’il serait vrai de se faire des concessions mutuelles sur le terrain des cinq sens actuels, au nom de l’Inconscient !

« Ô latitudes, altitudes, des Nébuleuses de bonne volonté aux