Page:Laforgue - Moralités légendaires.djvu/198

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Bercer, être bercée, la mer ne berce pas assez obligeamment.

Le vent est tombé, et c’est les accalmies, et l’horizon qui fait table rase mélancolique pour la cérémonie du couchant.

Bercer, être bercée !… Et la petite tête lasse d’Andromède s’emplit de rythmes maternels ; et lui revient le seul rythme humain qu’elle ait, la légende La Vérité sur le cas de Tout, petit poème sacré dont le Dragon, son gardien, a bercé son enfance.


« Au commencement était l’Amour, loi organisatrice universelle, inconsciente, infaillible. Et c’est, immanente aux tourbillons solidaires des phénomènes, l’aspiration infinie à l’Idéal.

« Le Soleil en est pour la Terre la clef de voûte, le Réservoir, la Source.

« C’est pour quoi le matin et le printemps sont de bonheur, pourquoi le crépuscule et l’automne sont de mort. (Mais comme rien n’est plus chatouilleux aux organismes supérieurs que se sentir mourir tout en sachant qu’il n’en sera rien, le crépuscule et l’automne, le drame du soleil et de la mort sont esthétiques par excellence.)

« L’impulsion d’Idéal est donnée depuis toujours et depuis toujours, dans l’espace infini, va s’objectivant en innombrables mondes qui se forment, ont leur évolution organique aussi élevée que le permettent leurs éléments, et puis se désagrègent pour de nouvelles éclosions de laboratoires.

« L’inconscient initial, lui, n’a à s’occuper que de monter plus haut, il a ses travaux particuliers, qu’il surveille sur quelques