Page:Lagrange - Œuvres (1867) vol. 1.djvu/52

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
xlvi
notice sur la vie et les ouvrages

estime, vient de faire, pour sa veuve et son frère, plus que jamais Frédéric n’avait fait pour lui-même pendant tout le temps qu’il avait illustré son Académie.

Il n’avait ambitionné ni ces honneurs ni ces richesses, mais il les recevait avec une respectueuse reconnaissance, et s’en réjouissait pour l’avantage des sciences. Il comptait se parer de ces titres au frontispice de l’Ouvrage qu’il faisait imprimer, pour montrer à l’univers à quel point les savants étaient honorés en France.

On voit, par ces derniers mots, qu’il n’avait pas perdu tout espoir de guérison ; il croyait seulement que sa convalescence serait longue ; il offrait ensuite, dès que ses forces seraient revenues, d’aller dîner chez M. le Comte de Lacépède avec MM. les Comtes Monge et Chaptal, et là il se proposait de leur donner sur sa vie et ses Ouvrages d’autres détails qu’ils ne pourraient trouver nulle part. Ces détails sont irrévocablement perdus. Nous ignorons même encore ce qu’il avait voulu, et ce qu’il aura pu ajouter au second volume de sa Mécanique, qui était déjà sous presse. (Ce volume a paru en 1816.)

Pendant cette conversation, qui dura plus de deux heures, la mémoire lui manqua souvent ; il faisait de vains efforts pour se rappeler les noms et les dates, mais son discours fut toujours suivi, plein de fortes pensées et d’expressions hardies. Cet emploi qu’il fit de ses forces les épuisa. À peine ses amis étaient retirés, qu’il tomba dans un abattement profond, et il mourut le surlendemain 10 avril, à neuf heures trois quarts du matin.

M. Lagrange était d’une complexion délicate, mais bonne ; sa tranquillité, sa modération, un régime austère et frugal, dont il s’écartait rarement, lui ont fait prolonger sa carrière jusqu’à l’âge de soixante-dix-sept ans deux mois et dix jours. Il avait été marié