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Page:Lahontan - Dialogues avec un Sauvage.djvu/36

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filles, ni même les desirer, que pour le mariage, ne tuer, ni faire tuer persone, ne dire du mal de ses fréres, ni mentir ; ne point toucher aux femmes mariées, ne prendre point le bien de ses fréres ; aller à la Messe les jours marqués par les Jésuites, & jeûner certains jours de la Semaine, car tu aurois beau croire tout ce que nous croïons des saintes Ecritures, ces préceptes y étant compris, il faut les observer, ou brûler éternellement aprez la mort.

Adario.

Ha ! mon cher Frére, voilà où je t’attendois. Vraîment il y a long temps que je sçai tout ce que tu me viens d’expliquer à présent. C’est ce que je trouve de raisonable dans ce Livre de l’Evangile, rien n’est plus juste ni plus plausible que ces ordonances. Tu viens de me dire que si on ne les exécute pas, & qu’on ne suive pas ponctuellement ces commandemens, la créance & la foy des Evangiles, est inutile ; pourquoy donc est-ce que les François le croient en se moquant de ces préceptes ? Voilà une Contradiction manifeste. Car I. à légard de l’adoration du grand Esprit, je n’en connois aucune marque dans vos actions, & cette adoration ne consiste qu’en paroles pour nous tromper. Par exemple, ne vois-je pas tous les jours que les Marchands disent en trafiquant nos Castors ; Mes marchandises me coûtent tant, aussi vray que j’adore Dieu ; je perds tant avec toy, vray comme Dieu est au Ciel. Mais, je ne vois pas qu’ils lui fassent des sacrifices des meilleu-