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du vieux temps

âgé des convives que réunit le souper de la veille de l’Épiphanie, qui préside et procède à la distribution du gâteau. Lorsque le moment de le couper est venu, il fait placer sous la table un enfant, — presque toujours le plus jeune de ceux qui assistent au repas, — et l’interpelle ainsi :

Phebe ?

Domine ! répond l’enfant.

La part à qui ?

Au bon Dieu.

La part à qui ? reprend encore le président, et cela autant de fois que la réunion compte de membres. L’enfant, à chaque question, indique l’un des convives, qui reçoit aussitôt sa portion de gâteau.

Anciennement, dans certains cantons du département de l’Indre, il arrivait, parfois, qu’après la part à Dieu, on en adjugeait une à quelque parent, à quelque ami, cher à la famille, mais que son éloignement empêchait d’assister à la joyeuse et cordiale agape de l’Épiphanie. Cette portion de gâteau était soigneusement mise en réserve, et son état de conservation ou d’altération, indiquait la fortune heureuse ou mauvaise de la personne absente. — Cette coutume et cette croyance existent encore en Bretagne et dans le pays chartrain.

Que l’on nous permette, avant d’aller plus loin, quelques observations sur les deux mots latins qui ouvrent le dialogue consacré que nous venons de rapporter. — « Phebe, dit fort bien M. Ribault de Laugardière, ne signifie point la fève, ainsi que le prétendent quelques-uns[1]. » — Cela est très-vrai, car, autrement, la demande et la réponse seraient sans liaison et sans raison. D’ailleurs, c’était un denier et non une fève que l’on mettait anciennement dans le gâteau. — « Phebe, continue M. de Laugardière, est une contraction évidente du

  1. Magasin pittoresque, 1833, p. 414. — Musee des familles, 1848, p. 98.