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souvenirs

ments, on vit le maître de la veille déposer ses hommages aux pieds de celui qui, hier encore, était le plus humble de ses serviteurs, mais qui, par la grâce de la fève, était devenu son roi. « Il y a trente-quatre ans (en 1822), dit, à ce propos, M. de Laugardière, que le dernier roi qui est allé à l’église d’Azy (Cher) se trouvait être un domestique du domaine de Marsilly, qui vit encore et porte suprême témoignage de ce qui n’est plus. »

Nos Majestés éprouvant fréquemment le besoin de se restaurer, deux officiers, entre tous, se tenaient constamment à leurs côtés : c’étaient le grand panetier, portant devant lui un large éventaire chargé d’une pyramide de gâteaux, et le grand bouteillier, muni d’un lourd panier garni de nombreux flacons. À chaque verre de vin que le prince daignait avaler, la foule faisait une décharge de mousqueterie à tout rompre et criait à tue-tête : Le roi boit ! Après quoi le premier valet de pied s’avançait et essuyait respectueusement la bouche, le visage et les mains de Sa Majesté.

La marche triomphale était égayée par des intermèdes de bouffonneries ; car, dans l’organisation des diverses maisons royales, on s’était bien gardé d’oublier le fou. — « Ce personnage, dit M. de Laugardière, ordinairement un jeune homme vif et facétieux, souvent couvert de paille comme une ruche, — origine du mot paillasse, — parfois habillé en arlequin, dansait et gambadait devant le roi, s’ingéniant à le faire rire par mille et une grimaces. Il portait une boîte remplie de farine qu’il répandait sous les pas du cortége ; mais quelquefois, irrévérencieux comme ont toujours eu le privilége d’être les fous et les bouffons, il se trompait ou feignait de se tromper, et lançait à la face de son auguste maître ce qu’il ne devait jeter qu’à ses pieds. »

Arrivés à l’église, le gros des cortèges encombrait la nef, tandis que les personnes royales trônaient majestueusement dans le chœur.