I
— Calèche[1], Monsieur ? Tels furent les premiers mots qui m’accueillirent, quand le train stoppa en gare de Port-Joli.
Pour la première fois, depuis vingt ans, cette apostrophe, jadis familière, résonnait à mon oreille. C’était tout un passé, tant de fois évoqué, que rappelait à ma mémoire ce témoin ; et, puisque le but de mon voyage était de revoir ce passé déjà lointain, j’étais servi à souhait. La calèche, jolie, confortable, pour me servir d’une métaphore, me tendait la main. Non, c’était plutôt les mains de multiples « calèchers » qui se tendaient vers moi, pour me happer au passage.
— Par « icitte » ! Monsieur Reillal ! me cria l’un des cochers qui dépassait les autres de toute la tête.
Je passai mon sac de voyage à celui qui m’avait accueilli par mon nom et montai dans la calèche d’un grand gaillard à l’air déluré.
— Vous allez à la Bastille, je suppose ? me dit mon conducteur d’un air entendu.
- ↑ On dit calèche pour cabriolet, à Québec.