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Voleurs de chevaux de profession, ces bandits s’étaient engagés comme guides pour mieux arriver à leurs fins.

Que faire dans cette plaine immense, sans provisions, sans eau potable et même sans argent ? car ils avaient tout emporté à l’exception de trois bouteilles de vin et la carabine de mon grand-père qu’il tenait toujours près de lui, même quand il dormait.

Le baron se lamentait et maudissait les mécréants qui s’étaient ainsi joués de lui.

— Je leur aurais bien donné les chevaux après notre excursion de chasse, disait-il. Pourquoi voler un homme honnête qui les avait pourtant bien payés ?

— Oui, répondit mon grand-père ; mais ils auront la chance de les revendre plusieurs fois avant que nous puissions les rejoindre.

— Comment courir à pied après ces bandits, eux qui se sauvent avec nos chevaux ?

Mon grand-père était figé de colère comme s’il eût été cloué au sol.

— J’aurais bien dû prendre vos soupçons en plus sérieuse considération !

— Savez-vous, baron, que je me reproche de ne pas avoir été assez vigilant ?

— C’est moi qui suis responsable, objecta le baron. Vous avez fait votre devoir et je vous en remercie.

— Il n’y a pas de temps à perdre, dit mon grand-père se ranimant tout en s’habillant.

— Mais comment courir à pied après ces habiles cavaliers, qui connaissent la prairie sur le bout de leurs doigts ? Autant vaut nous résigner à mourir tout de suite, continua le baron, que de s’épuiser en courses inutiles. Le temps est à la pluie ; cela nous procurera de l’eau en abondance et nous essaierons de nous tenir en vie avec du blé sauvage et les trois bouteilles de vin que ces messieurs les bandits, ah ! les mécréants ! ont eu la condescendance de nous laisser, et nous retournerons à Fort Garry à petites journées.