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des Drassel se prêtait bien à ces sortes de réunions mondaines, quoique la vie plutôt retirée de ses hôtes n’en donnait pas souvent l’occasion. La chaude hospitalité, dont jouissaient ceux qui en étaient favorisés, était cependant bien connue.

Malgré les protestations de Madame Drassel, André fut au nombre des invités.

Une discussion assez vive avait précédé l’invitation d’André au bal. Poussé par Agathe, son père avait ouvert la discussion :

— Je suppose, dit-il à son épouse d’un air de nonchalance simulée, que tu n’as pas oublié le gérant des usines, sur ta liste d’invités ?

— Je m’y attendais, répondit-elle sèchement. Tu n’auras pas voulu me laisser jouir complètement de cet événement !

— Oh ! je croyais que tu donnais ce bal pour Agathe, répondit Monsieur Drassel, feignant l’étonnement. Veux-tu qu’Agathe soit triste ou gaie, joviale, primesautière, ou morne et sans éclat, pour son début dans le monde que tu aimes tant ?

— Voilà une pierre dans mon jardin, que je ne prise guère. J’ai bien le droit d’aimer un peu le monde, et dans l’état de fortune où nous sommes, je n’en abuse pas ; je me plie plutôt à tes goûts casaniers et je ne m’en plains pas.

— Que veux-tu ? On n’a pas tous les mêmes goûts. Moi, j’aime mieux construire des usines,