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aussi apparentes. Mais quand il s’est agi de causes latentes ou ignorées, comme celles des épidémies, des épizooties, de la fièvre et des maladies diverses, des victoires et des défaites, etc., il a fallu inventer des corps pour ces causes ou forces personnifiées ; de là les fétiches ; tantôt idoles bizarres, dieux des nations, tantôt objets physiques fort grossiers, comme aujourd’hui encore dans l’Inde les boutams, pierres brutes auxquelles les hommes des jungles prêtent des pouvoirs démoniaques. Il est advenu ensuite des fétiches, comme de toutes les formes symboliques ; la grossièreté du vulgaire a confondu avec les symboles les forces ou pouvoirs qu’ils représentaient.

Le président de Brosset, dans sa Dissertation sur les Dieux Fétiches, publiée en 1700, a développé cette thèse (que le fétichisme, ou l’adoration d’objets matériels est la base et le fonds commun de toutes les religions primitives) ; et cette opinion a eu longtemps beaucoup de crédit. M. Max Muller l’a réfutée péremptoirement dans son livre qui a paru en 1870 : Origine et développement de la Religion, étudiés à la lumière des religions de l’Inde. Il a fait voir que le fétichisme est loin d’avoir eu la généralité qu’on lui avait accordée et que, le plus souvent ce qu’on avait pris pour des fétiches, était un pur symbolisme d’attributs moraux. C’est ainsi que Ganésa, le dieu hindou de la littérature et des beaux arts, est représenté avec une trompe d’éléphant, signe de l’intelligence et un très gros ventre qui figure l’opulence. On prendrait à première vue son idole pour un fétiche, et cependant